Introduction de reines vierges

Présentation

L’introduction de reines vierges pour le remérage de colonies présente de nombreux intérêts par rapport à l’introduction de reines fécondées :

  • L’élevage de reines vierges permet de sélectionner des traits de caractère d’intérêt (douceur, production, limitation des phénomènes d’essaimages…). C’est une pratique bien maîtrisée.
  • Elle permet de s’affranchir du processus d’insémination artificielle, couteux en temps et nécessitant l’achat de matériel onéreux et ultra-spécifique.
  • Le processus d’insémination artificielle s’accompagne généralement d’élevage de ruches à mâles, particulièrement sujets à la varroase, et engendrant également des frais.

Cependant, le taux d’acceptation des reines vierges reste relativement faible et assez hétérogène par rapport à l’introduction de reines fécondées. Les apiculteurs nous ont fait part de cette variabilité qui s’explique tant par la diversité des pratiques apicoles que par de nombreux autres facteurs dont nous maîtrisons mal les effets.

Pour répondre à cette problématique et sélectionner les méthodes ayant le meilleur taux de réussite, l’ADA Occitanie a souhaité tester et comparer différentes techniques d’introduction de reines vierges dans des essaims constitués en début de saison 2021.

Jeune reine vierge

Protocole expérimentale

Objectif :

Le but de l’expérimentation est de comparer trois méthodes d’introduction utilisées et jugées efficaces par les apiculteurs, en limitant au maximum le nombre de visites et de manipulations.

Création des essaims :

Les essaims de cet essai ont été constitués en deux temps au printemps, à partir du « cheptel InnovApi » :

  • 15 avril 2021 : 22 essaims sont constitués.
  • 23 avril 2021 : 44 autres essaims sont créés.

Ce décalage temporel dans la création des essaims a permis l’introduction des reines le même jour (24 avril 2021), tout en garantissant un temps d’orphelinage de 9 jours pour les premiers essaims formés, et de 24 heures pour les seconds.

Afin de limiter de possibles biais liés à la génétique ou à la composition de l’essaims, ces derniers seront tous constitués de :

  • Un cadre de couvain venant d’une ruche d’A. m. Caucasia
  • Un cadre de couvain venant d’A. m. Buckfast
  • Un cadre de réserve (miel et pollen)
  • Deux cires gaufrées
  • Une partition
  • 300mL d’abeilles provenant des deux ruches dans lequel le couvain a été prélevé.

Les cadres de couvain présentent tous les différentes phases de développement (œuf à la nymphe).

Création des essaims

Méthodes testées :

  • La méthode « Nicot » : dans une cage Nicot avec 7 accompagnatrices, la reine est introduite dans un essaim à 9 jours d’orphelinage. Les destructions de cellules royales se font à J6 et J9 après la création de l’essaim.
  • La méthode « IltisPro1 » :  Dans des cages inspirées des cages Iltis plus grandes (voir photo), la reine est introduite sans accompagnatrice après 24h d’orphelinage. Trois jours après la création de l’essaim, la reine est libérée.
  • La méthode « IltisPro2 » : Dans les mêmes cages présentées précédemment, la reine est introduite après 24h d’orphelinage. Les cellules royales sont détruites lors de sa libération au sixième jour.

Contrairement aux cages Nicot, les cages IltisPro sont réutilisables. La méthode IltisPro1 demande moins de visites et de passages pour détruire les cellules royales. Celle-ci serait la plus avantageuse si les trois méthodes montrent un même taux d’acceptation des reines vierges auprès des colonies.

Génétiques sélectionnées :

Deux génétiques d’abeilles ont été sélectionnées pour l’expérimentation car reconnues pour leur douceur : l’A.m Buckfast et l’A.m Carnica.

Sites et météorologie :

Les ruches seront déposées à Auzeville-Tolosane (31), à la miellerie de l’ADA, à plus de 3 km du lieu de création des essaims (en dehors de l’aire de butinage).

La météo sera relevée au cours de l’expérimentation car de mauvaises conditions peuvent être à l’origine de l’emballement des reines et influencer les résultats. A contrario, un temps clément peut favoriser les taux d’acceptation.

Temps d’orphelinage :

En temps normal, l’ADA Occitanie préconise un temps d’orphelinage de 7 à 9 jours afin d’éviter la présence résiduelle de phéromones royales de l’ancienne reine. Aussi, ce laps de temps associé à la destruction de cellules, rend impossible l’élevage de nouvelle reine à partir d’œufs, ces derniers ayant évolué en larves. Cependant cette technique demande plus de visites et une grande vigilance de la part de l’apiculteur pour ne pas rater des cellules royales.

Les techniques IltisPro 1 et 2 semblent un bon compromis à la méthode Nicot : le format de la cage et le temps d’encagement de 3 à 6 jours permettent à la reine de s’imprégner des odeurs de la ruche tout en libérant ses phéromones dans la colonie.

Cages « IltisPro » (à gauche) et Nicot (à droite)

 

Reines issues des souches de l’ADA Occitanie

 

Constitution des essaims

 

Suivi des colonies par les chargés de mission ADA Occitanie

 

Vérification de la présence des reines

 

Marquages des reines

©Eric Mérigot / Anthony Bouétard / Méghan Suquet

Plan d’expérimentation.

Légende : RV = Reine Vierge ; CR = Cellules Royales.

Résultats

Les analyses montrent une influence de la méthode d’introduction sur :

1°) Les taux d’acceptation : Les méthodes Nicot et IlitsPro1 montrent les mêmes taux d’acceptation de 95%. La méthode IltisPro1 serait donc à privilégier car nécessitant moins de manipulations et de visites. Par ailleurs, au vue des problématiques actuelles et de la volonté de beaucoup d’apiculteurs de réduire leurs déchets plastiques, les cages IltisPro ont l’avantage d’être réutilisables.

Concernant les méthodes IltisPro 1 et 2, la première présente de meilleurs taux d’acceptation.

2°) La présence de la reine : Il n’y a pas de différence entre la méthode Nicot et IltisPro 1, cependant il y a significativement moins de reines présentes après vérification avec la méthode IltisPro2 par rapport à Nicot.

3°) La présence de la ponte : Il n’y a pas de différence entre la méthode Nicot et IltisPro 1, cependant nous relevons significativement moins de présence de ponte avec la méthode IltisPro2 par rapport à Nicot.

4°) L’influence de la génétique : Aucune différence des taux mesurés n’a été relevée en fonction de la génétique.

Conclusion et discussion : La méthode IltisPro1 pourrait être la méthode à retenir de cette expérimentation. Elle présente les mêmes taux  d’acceptation et de présence de reine/ponte que la méthode Nicot. Mais elle a l’avantage d’être moins couteuse en temps de travail (moins de manipulations), et elle limite la production de plastique grâce à sa cage réutilisable.

Cependant, nous tenons à relever une limite de notre expérimentation liée à la météorologie. N’ayant pas été optimale au moment de la libération des reines des cages IltisPro2, nous pensons que les différents paramètres mesurés sur cette méthode ont pu être influencés négativement, notamment concernant la  qualité de la ponte de la reine (nombreux cas de multi-pontes, absence de ponte, ou encore œufs non fécondés). En effet, les vols de fécondation ont probablement été perturbés par les mauvaises conditions entrainant des pertes de reines et des mauvaises fécondations.

 

Histogrammes des variables étudiées en fonction des modalités testées. (le taux d’acceptation étant mesurée 24h après l’introduction)

 

 

Histogrammes des variables étudiées en fonction des modalités d’introduction et de la génétique étudiée

Figures par Meghan Suquet

Plus d'informations

Des questions sur l’introduction de reines vierges  ? Contactez Alice Rouzes pour le secteur Ouest de la région ou Anne-Laure Guirao pour le secteur Est.